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Chocolat : un secteur reboosté après Pâques

Après Pâques, vient l'heure du bilan pour le secteur du chocolat, qui se maintient malgré la crise et tente progressivement de s'étendre à l'international

Les chocolatiers réalisent en moyenne 5 % de leur chiffre d'affaires à Pâques.

 

Quelques jours après Pâques, il est temps de faire les comptes pour les chocolatiers. Cette période est en effet déterminante pour les entreprises de la filière, qui y réalisent en moyenne 5 % de leur chiffre d’affaires -contre 10% durant les fêtes de fin d’année. Et la quantité de chocolat vendue pour Pâques ne cesse d’augmenter d’année en année : elle est passée de 13 400 tonnes en 2010 à 14 700 tonnes deux ans plus tard. Une progression qui devrait se poursuivre cette année encore. Mais l’importance de cette fête n’est pas la même pour tous les chocolatiers. « Nous réalisons entre 5 % et 10 % de notre chiffre d’affaires à Pâques », estime Christine Eysseric-Rocca, responsable marketing et communication de Cémoi. L’entreprise dont les produits représentent plus de 30 % des chocolats vendus pour Pâques en GMS, a pu augmenter ses ventes de 2,6 % l’an dernier. Elle commercialise des chocolats sous sa propre marque, mais aussi sous MDD ou sous la marque Jacquot, qu’elle a racheté en 2007. « Les marques de distributeurs se vendent néanmoins moins bien au moment de Pâques. Les consommateurs sont plus attachés à des produits de marques pour ces périodes festives. »

Pâques : des achats de plus en plus tardifs

La chocolaterie Castelain, basée dans le Vaucluse, réalise quant à elle environ 20 % de ces ventes durant les fêtes de Pâques. L’entreprise, reprise en 2011 par deux anciens salariés de Mondelez a vu son chiffre d’affaires bondir de deux à quatre millions d’euros en l’espace de deux ans. Mais les résultats des chocolatiers sont également influencés par la date de Pâques et par la météo durant les semaines précédentes. « Globalement, la saison est malheureusement meilleure lorsque Pâques tombe en mars plutôt que mi-avril », explique Christine Eysseric-Rocca. Autre constat : les consommateurs font leurs achats de plus en plus tardivement. « Habituellement, les ventes s’accélèrent vraiment quinze jours avant Pâques. Mais elles se concentrent de plus en plus sur la dernière semaine », regrette Lionel Dosne, président de la chocolaterie Castelain, qui compte 26 salariés. Un constat vérifié cette année encore. « Entre 50 % et 60 % des ventes sont réalisées la dernière semaine, confirme la responsable commerciale de Cémoi. Et les implantations sont désormais plus tardives dans les magasins, d’autant que les consommateurs ont tendance à attendre jusqu’au dernier moment dans l’espoir de faire de bonnes affaires. »

La tradition des moulages en chocolat perdure

Les consommateurs plébiscitent avant tout les traditionnels moulages, qu’il s’agisse d’oeufs, de poules, de cloches, de lapins, de poissons, garnis ou non. C’est d’ailleurs grâce à l’absorption de la marque Jacquot, spécialisée dans les moulages, que Cémoi a renforcé sa présence en grande surface.

  Les ventes d’autres produits chocolatés tels que les pâtes à tartiner ou les tablettes ne bénéficient pour leur part que très peu de cette dynamique, bien que chez Cémoi « les ventes de moulages ont commencé à stagner ces dernières années alors que les confiseries, comme les petits œufs, trouvent davantage leur public. »  

Le chocolat, un secteur qui sait innover

Tradition n’est cependant pas synonyme d’absence d‘innovation. Si Cémoi continue de miser sur sa gamme Vichy, qui joue beaucoup sur la nostalgie, le groupe a lancé cette année une nouvelle gamme, destinée plus particulièrement aux enfants, dotée d’un emballage très graphique et ludique. Chaque année, les chocolatiers proposent de nouvelles formes, couleurs, associations de goûts et de textures, packaging ou services pour adapter l’indémodable chocolat.

  Depuis deux ans, la chocolaterie Castelain a par exemple décidé d’étendre sa gamme de moulages. « Nous avons choisi de rester sur du chocolat très traditionnel, sans couleur : noir, lait ou blanc, explique Lionel Dosne, mais nous avons cependant un large choix de petits moulages, d’une vingtaine ou d’une trentaine de grammes. » Coccinelles, tortues, hérissons, animaux de la savane, chiens, canards : cette diversité a permis à l’entreprise d’accroître considérablement son chiffre d’affaires. Les petits moulages sont en effet de plus en plus plébiscités par les consommateurs, pratiques pour la chasse aux œufs et moins coûteux.

Les chocolatiers misent sur le packaging

Certains chocolatiers ont quant à eux choisi de travailler sur la façon de consommer la produit, comme la maison Fossier, qui propose des sucettes en chocolat spécialement pour Pâques. D’autres misent sur l’emballage, comme Weiss, avec sa boîte de six œufs de poules remplie de chocolat ou encore comme Le Petit Duc, qui est allé jusqu’à enrober ces œufs en chocolat d’une coquille.   « L’innovation, c’est ce qui porte le marché du chocolat en France, affirme Florence Pradier, secrétaire générale du syndicat de la filière. Le chocolat est l’un des produits les plus riches en termes aromatique et qui peut en même temps être associé à une infinité de goûts pour créer des mariages étonnants et détonants. »

Chocolat : la France, un marché test

Et si les Français n’ont pas la réputation d’être les plus friands d’innovations lorsqu’il est question de gastronomie, le marché du chocolat est l’exception qui confirme la règle, estime Florence Pradier. « Les consommateurs français sont en attente de nouveautés et ils n’en ont pas peur. La France est d’ailleurs souvent considérée comme un marché test. »  Stable malgré la crise, le marché du chocolat français reste à part. « C’est un aliment réellement ancré dans la consommation des Français. Bien qu’il ne soit pas un produit de première nécessité, les consommateurs ne s’en passent pas, même lorsque leur pouvoir d’achat baisse », se réjouit la représentante du secteur, qui pesait en 2012 plus de 392 000 tonnes et 2 762 millions d’euros.

Le dynamisme du marché des tablettes de chocolat

C’est le marché des tablettes qui reste le plus dynamique en France. Ces dernières comptent pour un tiers de la consommation de chocolat du pays. Et certaines chocolateries investissent en priorité ce segment. La chocolaterie Castelain réalise par exemple 50 % de son chiffre d’affaires grâce aux seules tablettes. Et les ventes poursuivent d’ailleurs leur essor. C’est l’une des grandes particularités de la France, en plus de son amour inconditionnel pour le chocolat noir– il représente 30 % du chocolat consommé en France. Par ailleurs, le marché intérieur stagne, les exportations décollent progressivement. En 2012, elles ont augmenté de 0,3 % en valeur mais de 7,6 % en volume, bien que la France ait parallèlement perdu des parts de marché face à l’Allemagne, les Pays-Bas ou les États-Unis, dont le rythme de croissance des exportations est plus soutenu. La balance commerciale du secteur est d’ailleurs encore largement dans le rouge en France, avec un déficit de 200 millions d’euros en 2012 sur les produits semi-finis et finis. A noter tout de même que ce déficit est en baisse. Il était en effet de plus de 350 millions en 2011.

Pays tiers : un fort potentiel de croissance pour les chocolatiers français

La France exporte encore majoritairement en Europe, mais il existe de réels potentiels de croissance hors UE, et notamment en Chine, en Inde, aux Émirat Arabes Unis, en Indonésie ou encore en Russie. Des pays où la France peut faire valoir son savoir-faire ancestral ainsi que la qualité de ces produits en termes de goût et de matières premières. « Les marchés étrangers, en particulier les États-Unis et la Russie, apprécient beaucoup le chocolat français, estime Christine Eysseric-Rocca. Le chocolat noir et les truffes sont nos produits phares à l’international. » Le groupe enregistre d’ailleurs près de la moitié de son chiffre d’affaires en dehors de l’Hexagone.   Ces nouvelles perspectives de développement tombent à point nommé alors que la hausse et la volatilité des cours des matières premières continuent de pénaliser le secteur. « Les cours du cacao ont augmenté de 93 % entre 2006 et 2013, affirme Florence Pradier. Dans le même temps, l’indice des prix du chocolat n’a augmenté que de 9 % contre 15 % pour celui des produits alimentaires. » Les entreprises absorbent pour l’instant le différentiel, mais cette configuration semble difficilement tenable sur le long terme, sachant que le cacao peut représenter jusqu’à 70 % du prix de revient d’une tablette. Et cela, sans même évoquer la possible pénurie de chocolat à l’horizon 2020.

ParLa rédaction
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