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Ressemer sa récolte sera à présent interdit ou taxé.

Selon une information du journal Le Monde, le Parlement a adopté lundi 28 novembre une proposition de loi UMP réglementant le fait de ressemer sa propre récolte. Ainsi, les traditionnelles « semences de ferme » seront soit totalement interdites soit soumises à redevance.

 

Jusqu’à maintenant, ressemer des espèces protégées par un Certificat d’Obtention Végétale (COV) était théoriquement interdit mais largement toléré dans les faits. Selon Delphine Guey, du Groupement National Interprofessionnel des Semences (GNIS), « sur les quelque 5 000 variétés de plantes cultivées dans le commerce, 1 600 sont protégées par un COV. Ces dernières représentent 99% des variétés cultivées par les agriculteurs ». Or, selon la Coordination Nationale pour la Défense des Semences Fermières (CNDSF), environ la moitié des céréales cultivées étaient jusqu’alors ressemée.

 

Ainsi, la proposition de loi du sénateur UMP Christian Demuynck transpose la convention de l’Union internationale pour la protection végétale (UPOV), adoptée en 1991, ratifiée par la France en 2006, mais jamais réellement appliquée. Les semences fermières seront à présent légales à condition de verser une « rémunération aux titulaires des COV afin que soit poursuivi le financement des efforts de recherche et que les ressources génétiques continuent d’être améliorées ». Seules les petites exploitations produisant moins de 92 tonnes de céréales seront exemptes de cette taxe.

En réalité, ce dispositif existe déjà depuis 2001 pour les semences de blé tendre, la rémunération aux semenciers étant baptisée « contribution volontaire obligatoire » et représentant 50 centimes par tonne de blé.

 

Guy Kastler, délégué général du réseau Semences paysannes et membre de la Confédération paysanne, résume : « pour la moitié des espèces cultivées – le soja, les fruits, les légumes… –, il est interdit de réutiliser ses propres graines, et pour l’autre moitié – céréales et plantes fourragères –, il faut payer pour ressemer ».

Les associations de producteurs et écologistes déplorent une privatisation des semences. Ainsi, Guy Kastler regrette que « même les agriculteurs qui se passent des semences commerciales doivent payer pour ces semences ».

Autre menace : une perte de biodiversité. En effet, ressemer sa récolte peut parfois entraîner des mutations, et ainsi des variations génétiques au sein d’une même espèce, apportant alors de la biodiversité. « Des caractères nouveaux apparaissent, permettant à la plante d’être mieux adaptée au sol, au climat, aux conditions locales. Il est alors possible de réduire les engrais et les pesticides. A l’inverse, les semenciers adaptent les plantes aux engrais et aux pesticides, qui sont partout les mêmes », explique M. Kastler.

Encore plus strict que le COV, qui représente une alternative en France, le brevet sur le vivant interdit totalement aux agriculteurs de ressemer leur récolte, même s’ils paient une taxe. Monsanto utilise notamment ce type de protection.

 

Selon Les Echos, les réactions sont pour le moins mitigées. Ainsi, Bruno Le Maire a estimé que « la pratique des semences de ferme doit être autorisée, mais qu’elle ne peut pas être libre de droit comme elle l’est aujourd’hui ». Au contraire, le député PS Germinal Peiro a considéré que cette taxe est « une dîme » et que le ministre « livre l’agriculture aux rois de la semence ». Les Verts ont déclaré qu’il s’agissait d’une « menace des droits fondamentaux des agriculteurs ». Le député PCF Jean-Pierre Brard a reproché au ministre de l’Agriculture de confondre « sélection naturelle » et « sélection boursière ».

Les syndicats, enfin, sont partagés. Ainsi, si la FNSEA juge « normal que tous les agriculteurs financent la création variétale puisqu’ils en bénéficient », pour la Confédération paysanne « le droit de ressemer et d’échanger les semences ne peut pas être remis en cause au profit d’intérêts privés ».


Le rapport de Thierry Lazzaro au propos de cette loi réglementant les COV est disponible en ligne.

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