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Une révolution verte dans l’univers du CO₂, une opportunité stratégique pour l’agroalimentaire

Alors que le marché du dioxyde de carbone fait face à des tensions d’approvisionnement inédites, une initiative portée par des agriculteurs méthaniseurs, le collectif CAPCOO, ouvre une voie nouvelle, durable et résiliente. Pour les professionnels de l’agroalimentaire, cette mutation de la filière CO₂ n’est pas seulement une innovation industrielle : elle représente un levier crucial pour sécuriser leurs chaînes de production, améliorer leur traçabilité et réduire leur empreinte carbone.

Alors que le marché du dioxyde de carbone fait face à des tensions d’approvisionnement inédites, une initiative portée par des agriculteurs méthaniseurs, le collectif CAPCOO, ouvre une voie nouvelle, durable et résiliente. Pour les professionnels de l’agroalimentaire, cette mutation de la filière CO₂ n’est pas seulement une innovation industrielle : elle représente un levier crucial pour sécuriser leurs chaînes de production, améliorer leur traçabilité et réduire leur empreinte carbone.

Longtemps considéré comme un simple gaz industriel ou un polluant climatique, le dioxyde de carbone (CO₂) s’invite désormais au cœur des stratégies de transition écologique. Dans les usines de transformation agroalimentaire, il joue un rôle essentiel : gaz inerte pour la conservation des produits, fabrication de boissons pétillantes, production de carboglace pour le froid, ou encore atmosphère contrôlée pour les serres maraîchères. Pourtant, derrière cette utilisation discrète, se cache une dépendance forte à une ressource largement dominée par quelques grands producteurs, issue de procédés industriels fossiles, souvent importée ou éloignée des bassins de consommation.

Dans ce contexte, l’émergence de CAPCOO (Collectif d’Agriculteurs Producteurs de CO₂ Biogénique) constitue un véritable tournant. Créé en 2024 avec le soutien du groupe Keon, spécialiste de la méthanisation, ce collectif regroupe déjà 25 unités de méthanisation agricoles réparties sur tout le territoire français. Leur ambition ? Valoriser le CO₂ biogénique, un coproduit de la méthanisation, en une ressource stratégique locale, propre et traçable. Une promesse porteuse de sens pour un secteur agroalimentaire en quête de souveraineté et de durabilité.

Un CO₂ agricole, durable et normé pour les usages alimentaires

Contrairement au CO₂ industriel fossile, généralement produit lors de la fabrication d’engrais azotés ou via des procédés énergivores, le CO₂ biogénique de CAPCOO provient directement de la dégradation de matière organique dans les méthaniseurs agricoles. Ce gaz, auparavant rejeté dans l’atmosphère, est désormais capté, purifié, liquéfié, puis stocké dans des cuves cryogéniques, avant d’être distribué à des clients industriels ou alimentaires.

Cette approche présente plusieurs atouts majeurs pour les professionnels de l’agroalimentaire : une qualité certifiée alimentaire (norme E290, conforme aux référentiels EIGA & ISBT), une traçabilité totale de la source à l’usage, et surtout une empreinte carbone neutre, puisque le carbone émis avait été capté auparavant par la biomasse. En choisissant ce CO₂ biogénique, les industriels peuvent non seulement sécuriser leur approvisionnement mais aussi inscrire concrètement leur démarche dans une logique de décarbonation.

Une réponse concrète à la crise du CO₂ et à la volatilité des marchés

Depuis plusieurs années, le marché du CO₂ traverse une série de secousses : arrêts temporaires de production d’engrais en Europe, tensions sur les chaînes logistiques, augmentation des usages (notamment pour les carburants de synthèse ou la production d’hydrogène), et hausse des prix. Ces perturbations ont parfois provoqué des ruptures d’approvisionnement critiques pour certaines industries agroalimentaires, contraintes de ralentir ou d’arrêter temporairement leur activité.

CAPCOO apporte ici une alternative structurante. Grâce à son maillage territorial – chaque méthaniseur livrant dans un rayon de 150 km – le collectif propose un modèle en circuit court, résilient face aux aléas logistiques, et capable de garantir des volumes constants sur toute l’année. En plus de réduire les émissions liées au transport, cette proximité logistique permet aux industriels de mieux anticiper les coûts, avec une grille tarifaire transparente et stable, en rupture avec les pratiques souvent opaques du marché traditionnel du CO₂.

Mutualisation, logistique intégrée et partage de la valeur

Derrière CAPCOO, c’est un nouveau modèle économique qui se dessine, porté par une logique de coopération interprofessionnelle. Le collectif mutualise les moyens de ses membres pour organiser la collecte, le contrôle qualité, la logistique, l’installation de réservoirs cryogéniques et la gestion commerciale. Un guichet unique, en somme, pensé pour simplifier les démarches des industriels et garantir un haut niveau de service.

Pour les exploitants agricoles, l’enjeu est également majeur : CAPCOO leur offre un débouché supplémentaire, structurant et rémunérateur. « Nous remettons les producteurs (les agriculteurs-méthaniseurs) au cœur de la chaîne de valeur », insiste Baptiste Dubois, dirigeant de CAPCOO. Cette redistribution de la valeur crée une dynamique vertueuse, à la fois environnementale et économique, en renforçant l’ancrage territorial de la production.

Un enjeu de souveraineté industrielle pour la filière agroalimentaire

En filigrane, c’est bien une question de souveraineté industrielle qui se joue avec l’essor de cette nouvelle filière. Dans un contexte où la production européenne d’engrais recule, où les tensions géopolitiques fragilisent certaines importations, et où les exigences de durabilité s’intensifient, sécuriser des approvisionnements clés comme le CO₂ devient un impératif stratégique.

Le secteur agroalimentaire, particulièrement exposé à ces enjeux, a tout à gagner à soutenir et adopter ce nouveau modèle. D’autant que les perspectives sont considérables : le marché du CO₂ en France est aujourd’hui estimé à 500 000 tonnes par an, mais pourrait être multiplié par 13 à 20 d’ici 2050, sous l’effet de la croissance des usages industriels et énergétiques.

En choisissant le CO₂ biogénique, les industriels du secteur agroalimentaire ne se contentent pas de sécuriser leurs besoins ; ils participent à la structuration d’une filière verte d’avenir, ancrée dans les territoires, alignée avec les objectifs climatiques, et capable de rivaliser avec les standards internationaux.

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