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Thon en boîtes : Le secteur évolue vers plus de durabilité

Greenpeace France vient de publier la troisième édition de son classement qui évalue la durabilité du thon en boîte vendu par les douze plus grandes marques françaises et constate un net progrès du secteur vers plus de durabilité. « Le thon en boîte est un produit de consommation plébiscité par les Français. Pourtant, les marques communiquent encore trop peu …

Thon en boîtes : Le secteur évolue vers plus de durabilité
La plupart des thons que l’on retrouve dans les conserves en France viennent de l’océan Indien et de l’Atlantique, pêchés par des thoniers senneurs, des navires industriels de flotte le plus souvent européenne (française ou espagnole).

Greenpeace France vient de publier la troisième édition de son classement qui évalue la durabilité du thon en boîte vendu par les douze plus grandes marques françaises et constate un net progrès du secteur vers plus de durabilité.
« Le thon en boîte est un produit de consommation plébiscité par les Français. Pourtant, les marques communiquent encore trop peu autour des techniques de pêche qu’elles utilisent et de l’impact écologique que celles-ci peuvent avoir. Avec ce classement, notre objectif est de pallier ce manque d’information et de guider les consommateurs dans leurs achats », explique Edina Ifticene, chargée de campagne océans à Greenpeace France.
La méthodologie du classement de cette nouvelle édition est basée sur un questionnaire (disponible sur simple demande) transmis aux 12 plus grandes marques de thon en boîte. L’objectif de ce questionnaire était d’évaluer les changements opérés par les marques depuis deux ans sur la durabilité de leur approvisionnement (espèces, méthodes de pêche, politiques d’approvisionnement…).
Les questions posées ont appelé différents types de réponses sur les données chiffrées précises sur la part de chaque stock de thon (espèce et provenance) composant l’approvisionnement ; la part de chaque méthode de pêche employée pour pêcher le thon vendu par la marque. Sur des données qualitatives comme le détail du contenu des politiques d’approvisionnement ; des copies de documents permettant de prouver la traçabilité du thon depuis le bateau jusqu’à la boîte de conserve ; la liste des fournisseurs ; la liste des changements concrets opérés entre 2015 et 2017 en termes d’espèces et de méthodes de pêche et le niveau de détail de l’information disponible pour les consommateurs à partir des boîtes.

Le thon, symbole de la surpêche

Selon la FAO, 90% des espèces marines commercialisées sont aujourd’hui surexploitées ou pêchées à la limite de durabilité et une étude de 2015 indique que la quantité de thons, maquereaux et bonites a diminué de 75% par rapport à 1970. Avec 1% des navires qui capturent 50% des espèces pêchées, ce secteur de la pêche industrielle exerce une pression trop forte sur la vie marine. Si nous n’inversons pas cette tendance, les générations futures pourraient ne pas connaître le goût du poisson.
Avec près de cinq millions de tonnes pêchées par an, les espèces de thons – listao, albacore, thon obèse et thon germon – constituent l’une des plus importantes pêcheries au monde.
« C’est une pêcherie intensive et internationale, aujourd’hui hors de contrôle. On y retrouve tous les problèmes de la surpêche : une surcapacité avec une trop forte pression de pêche, des techniques de pêche destructrices, un manque de contrôle, de la pêche illégale, peu ou pas de limite de captures, des données scientifiques peu fiables, mais aussi un partage inéquitable des bénéfices de cette ressource, ainsi que des problèmes sociaux et de respect des droits humains » dénonce Greenpeace.
Selon l’ONG, l’industrie du thon mène une course au profit à court terme. Une stratégie qui serait soutenue par les Etats qui, au détriment du bien commun et d’une gestion durable de cette ressource partagée, ne font que défendre leurs intérêts économiques. Les solutions pour mettre fin à la surpêche sont entre les mains de différents acteurs. Bien sûr, celles des décideurs politiques qui ont la responsabilité d’établir les règles de contrôle et de gestion des pêcheries et d’affecter des moyens conséquents pour faire respecter ces règles. Mais également dans celles des acteurs économiques : ceux qui pratiquent la pêche, possèdent les bateaux, passent commande, achètent les matières premières, et les revendent sous forme de produits finis.

Les méthodes destructrices de pêche encore trop employées

La plupart des thons que l’on retrouve dans les conserves en France viennent de l’océan Indien et de l’Atlantique, pêchés par des thoniers senneurs, des navires industriels de flotte le plus souvent européenne (française ou espagnole). Leurs méthodes de pêche trop intensives entraînent la prise de thons juvéniles ainsi que d’espèces menacées, en particulier les requins (jusqu’à 960 000 chaque année dans l’océan Indien).
L’une des méthodes mises en cause sont les dispositifs de concentration de poissons (DCP) qui sont chacun constitués d’un objet flottant qui dérive. Au niveau mondial, la pêche thonière tropicale sur DCP génère deux à quatre fois plus de rejets d’espèces non visées que la même pêche sans DCP, soit 100 000 tonnes par an.
Les DCP sont également une source inquiétante de pollution marine : environ 20% des DCP sont perdus chaque année et peuvent se retrouver emmêlés dans des récifs coralliens et prendre au piège d’autres animaux marins. Dans les eaux des Seychelles, on peut estimer qu’au moins 10 000 DCP sont actifs en permanence et qu’au moins 2 000 DCP fantômes sont perdus chaque année, qui dérivent au gré des courants. Le nombre total de DCP actifs dans le monde n’est pas connu, l’industrie refusant de donner les informations.

Un net progrès en 2017 du marché

En comparaison des précédentes éditions 2014 et 2015, le classement 2017 indique un net progrès du marché français du thon en boîte vers la durabilité. La majorité des marques ont aujourd’hui opéré un changement concret dans leur approvisionnement en faisant désormais plus de place aux thons pêchés à la senne sans DCP et en diversifiant les stocks de thons pour ne pas reposer uniquement sur les plus menacés. Presque toutes les marques ont désormais une politique d’approvisionnement écrite, avec un objectif de réduction de l’usage des DCP. Cependant, la méthode de pêche la plus durable, la canne, peine toujours à s’implanter sur le marché français et demeure la spécificité des marques chefs de files de la durabilité. Cependant, le marché français a encore des efforts à fournir pour pouvoir atteindre les standards des marchés les plus durables dans le monde comme les marchés britannique ou australien.
Car l’objectif à terme est bien que l’ensemble des approvisionnements repose sur une industrie qui respecte le droit des travail leurs tout au long de la chaîne d’approvisionnement et pratique une pêche durable, selon des modalités qui ne compromettent pas le renouvellement des populations de thons et la santé des écosystèmes marins.

En comparaison des précédentes éditions 2014 et 2015, le classement 2017 indique un net progrès du marché français du thon en boîte vers la durabilité. Presque toutes les marques ont désormais une politique d’approvisionnement écrite, avec un objectif de réduction de l’usage des DCP.

Les marques font des progrès

Sans surprise, ce sont depuis trois ans les mêmes marques qui se partagent le haut du classement. Cependant, elles ne se sont pas reposées sur leurs lauriers et ont elles aussi accompli des progrès. Monoprix fait son entrée dans le classement en intégrant directement cette catégorie, en raison de leur choix de privilégier le thon pêché à la senne sans DCP et de communiquer sur les bénéfices environnementaux de cette méthode de pêche auprès de leur clientèle.
Phare d’Eckmühl, la marque du groupe Chancerelle, reprend sa place de numéro 1 car elle est la seule à avoir désormais un approvisionnement 100% thons pêchés à la canne. Elle a en outre réduit de 15% les volumes de thon albacore dont les stocks sont menacés, et introduit du thon listao, dont les stocks se portent mieux. L’enseigne Système U confirme sa place de leader au sein de la grande distribution en étant celle qui privilégie le thon pêché à la canne pour plus de 95% de son approvisionnement, ainsi que le thon listao à 91%, dont le s stocks sont en meilleur état que ceux des thons albacore. Connétable, la marque du groupe Chancerelle a atteint son objectif visant à ne plus s’approvisionner en thons pêchés sur DCP d’ici à fin 2016. La majorité du thon pêché est issue de pêche à la senne sans DCP ou à la canne. Quant à l’enseigne Monoprix vend 100% de thon pêché à la senne sans DCP. Elle a introduit une référence de thon pêché à la canne. Elle a aussi fait le choix d’une communication pédagogique sur ses méthodes de pêche dans ses magasins et s’est ainsi distinguée de ses concurrents.

Sur la bonne voie

Ces marques continuent de vendre une majorité de thons pêchés sur DCP mais elles ont accompli des progrès notables dans la durabilité de leur approvisionnement depuis 2015. La bonne nouvelle est que ce groupe de marques s’est agrandi comparé à il y a trois ans. Cette catégorie est un indicateur de l’évolution du marché français du thon en boîte vers des meilleures pratiques environnementales et sociales. L’enseigne Carrefour a progressé sur son approvisionnement en proposant aujourd’hui 35% de thons pêchés à la senne sans DCP. Elle a également augmenté la part de thons pêchés à la canne. Carrefour se distingue aussi dans le domaine de l’information aux consommateurs puis que la technique de pêche est indiquée sur la boîte, ce qui est une première concernant la méthode de pêche à la senne sans DCP.

Petit Navire, marque leader du marché français, a désormais une politique d’approvisionnement ayant pour objectif de doubler la proportion de thons pêchés sans DCP d’ici à 2020.

La marque Petit Navire, leader du marché français a désormais une politique d’approvisionnement ayant pour objectif de doubler la proportion de thons pêchés sans DCP d’ici à 2020. Elle reconnaît ainsi que toutes les techniques de pêche ne sont pas équivalentes en termes d’impact sur la vie marine. Aujourd’hui, un quart des volumes de thons vendus par la marque sont pêchés à la senne sans DCP et 5% à la canne, soit deux fois plus qu’en 2015 pour cette catégorie. Un progrès a été fait en réduisant les volumes de thons pêchés sur DCP par rapport à 2015 (moins 13 points). En revanche, des efforts restent à faire sur le choix des stocks de thons. L’approvisionnement de la marque repose en effet toujours aujourd’hui en majorité sur des stocks menacés. Enfin, Petit Navire se distingue des autres marques, comme cela était déjà le cas en 2015, en proposant un système de traçabilité en ligne permettant au consommateur de retracer l’origine du thon contenu dans les boîtes jusqu’au bateau et à la zone de pêche.
L’enseigne Casino a bien progressé par rapport à 2015 puisqu’elle était avant – dernière du classement. Elle a désormais adopté un objectif de s’approvisionner à 60% en thons pêchés sans DCP à l’horizon fin 2018 . Elle a multiplié par deux et demie la proportion de thons pêchés sans DCP depuis deux ans, po ur atteindre près d’un quart de son approvisionnement en 2017. Elle a réduit son approvisionnement en thon albacore dont les stocks sont menacés et s’engage à ne plus développer l’offre de ces produits.
L’enseigne Auchan a, elle aussi, augmenté la part de thons pêchés sans DCP dans son approvisionnement en passant de 5% à 37% des volumes. Elle a introduit une référence de thon pêché à la canne. En revanche, la part de thon obèse et de thon albacore, dont les stocks sont menacés, ont augmenté.
L’enseigne Intermarché garde une part importante de thon pêché sur DCP et la part de thon pêché à la canne demeure négligeable avec moins de 1%. La marque a cependant augmenté la part de thon pêché à la senne sans DCP en 2017 et sa politique d’approvisionnement pré voit un passage à 50% du thon pêché sans DCP pour le thon albacore d’ici à 2020.

Les retardataires

Ces trois marques sont les seules qui n’ont pas commencé à opérer un changement dans leur approvisionnement. Elles sont les lanternes rouges d’un secteur qui s’est engagé vers des pratiques plus durables.

« Saupiquet n’a pas su prendre le virage opéré par ses concurrents et s’est reposée sur ses lauriers. 99% du thon qu’elle vend est pêché sur DCP » regrette Greenpeace.

La marque Saupiquet dégringole dans le classement 2017. Elle n’a pas su prendre le virage opéré par ses concurrents et s’est reposée sur ses lauriers. 99% du thon qu’elle vend est pêché sur DCP. Elle a en revanche réduit la part des stocks de thons menacés de thon albacore de l’Atlantique au profit des stocks de thon listao, en meilleure santé. La marque propose aussi, comme Petit Navire, un système de traçabilité en ligne. Le groupe Bolton, maison – mère de Saupiquet, est en train de travailler sur une politique d’approvisionnement durable mais celle – ci n’est pas finalisée pour le moment. A suivre donc. L’enseigne Leclerc a répondu au questionnaire pour la première fois depuis trois ans. On peut donc noter un effort de transparence. Malheureusement, un peu plus de 95% du thon vendu par l’enseigne est pêché sur DCP. Autre point regrettable, il n’y a pas de politique d’approvisionnement écrite permettant d’évaluer les efforts envisagés par la marque pour améliorer la durabilité de ses produits. Enfin, l’enseigne Lidl fait son entrée dans le classement… à la dernière place ! 100% du thon vendu par l’enseigne est pêché sur DCP. Sa politique d’approvisionnement mentionne la volonté d’augmenter les approvisionnements en thons pêchés sans DCP à partir de 2018, mais sans objectif chiffré. (Sources : Greenpeace).

ParLa rédaction
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