L’Occitanie, une place majeure pour le secteur agroalimentaire
L’agroalimentaire occupe une place centrale dans l’économie régionale d’Occitanie. En 2022, les 2 959 entreprises des industries agroalimentaires (IAA) ont généré un chiffre d’affaires de 9,6 milliards d’euros, en hausse de 6 % par rapport à 2021 selon le rapport de l’Agreste. Même si cette progression reste en deçà de la croissance observée dans l’ensemble de l’industrie manufacturière (+29 …

L’agroalimentaire occupe une place centrale dans l’économie régionale d’Occitanie. En 2022, les 2 959 entreprises des industries agroalimentaires (IAA) ont généré un chiffre d’affaires de 9,6 milliards d’euros, en hausse de 6 % par rapport à 2021 selon le rapport de l’Agreste. Même si cette progression reste en deçà de la croissance observée dans l’ensemble de l’industrie manufacturière (+29 %), elle témoigne d’une résilience solide, en dépit d’un contexte inflationniste, climatique et géopolitique incertain.
Le poids de ce secteur est d’autant plus significatif qu’il assure plus de 24 000 emplois en équivalent temps plein (ETP), dont 4 570 dans les grandes entreprises. Ces dernières, bien que peu nombreuses, concentrent 29 % du chiffre d’affaires et 31 % de la valeur ajoutée de la région. Si l’on ajoute les entreprises de taille intermédiaire, ce sont deux tiers de la richesse produite par les IAA occitanes qui émanent de ces structures. Une concentration qui souligne l’importance de ces acteurs structurants, tout en illustrant les disparités entre les petites unités locales et les poids lourds régionaux.
Parmi les filières les plus contributives à la valeur ajoutée régionale, la fabrication d’aliments pour animaux se distingue nettement avec 22 %, devant la fabrication de boissons (18 %), la transformation de la viande (14 %), celle des fruits et légumes (13 %), et les autres produits alimentaires comme le chocolat ou les plats préparés (12 %). Cette diversité d’activités traduit la richesse du tissu agroalimentaire, enraciné dans une agriculture locale fortement diversifiée, en lien étroit avec la variété géographique de l’Occitanie : littoral méditerranéen, coteaux viticoles, plaines céréalières, zones de montagne ou d’élevage.
L’ancrage territorial de ces entreprises se vérifie dans tous les départements. Le secteur irrigue le territoire en opportunités d’emploi, souvent dans des zones rurales où l’industrie agroalimentaire représente un moteur économique essentiel. Cette territorialisation, souvent synonyme de proximité avec les matières premières agricoles, constitue un atout de compétitivité, mais impose aussi des défis logistiques, notamment dans un contexte d’instabilité des circuits d’approvisionnement mondiaux.
Le commerce extérieur occupe également une place croissante. 23 % du chiffre d’affaires des IAA occitanes est désormais réalisé à l’export, avec une hausse de 15 % entre 2021 et 2022. Ce dynamisme international témoigne de la notoriété des productions régionales et de leur reconnaissance sur les marchés étrangers. Toutefois, cette performance reste fragile et soumise à de nombreux aléas : augmentation des coûts de production, politiques protectionnistes, conflits internationaux comme la guerre en Ukraine, ou encore risques sanitaires (influenza aviaire, MHE).
Enfin, la baisse de 5 % de la valeur ajoutée en 2022 par rapport à 2021 rappelle les tensions qui pèsent sur la rentabilité des entreprises, en dépit du dynamisme commercial apparent. Cela souligne le besoin crucial d’investir dans des modèles plus robustes, durables et différenciants.
L’agroalimentaire en Occitanie confronté aux défis structurels et conjoncturels qui redéfinissent ses priorités
Au-delà de ses performances économiques, l’agroalimentaire en Occitanie est confronté à une série de défis structurels et conjoncturels qui redéfinissent ses priorités. Le secteur est engagé dans une double transition : écologique et alimentaire, tout en devant gérer les conséquences d’une série de crises majeures.
La crise sanitaire de 2020 a marqué un tournant. Elle a accéléré la structuration de filières régionales, favorisé les approvisionnements locaux, et renforcé la demande des consommateurs pour des produits de proximité et de qualité. Ces tendances de fond ont stimulé le développement de filières territorialisées, notamment dans les productions sous Signes d’Identification de la Qualité et de l’Origine (SIQO). L’Occitanie est aujourd’hui la première région française en nombre de SIQO, reflet d’un engagement historique en faveur de la qualité et de la typicité des produits.
Mais cette dynamique est freinée par plusieurs facteurs. L’influenza aviaire, réapparue fin 2020, a fortement affecté la filière gras dans des départements emblématiques comme le Gers, les Hautes-Pyrénées ou l’Aveyron. Malgré la mise en place d’une stratégie vaccinale, la restructuration opérée par les grands groupes a eu un impact social et industriel important, notamment sur les abattoirs et les sites de transformation.
La maladie hémorragique épizootique (MHE), survenue en 2023, a impacté la production bovine, ovine et caprine, conduisant à des restrictions à l’export vers certains pays tiers. Ces crises sanitaires fragilisent les filières, mais illustrent aussi le besoin d’une plus grande résilience, via l’investissement dans la biosécurité, la diversification, et la relocalisation.
Les aléas climatiques représentent un autre front de vulnérabilité. Sécheresses, gel, épisodes de grêle et réchauffement des températures bouleversent les calendriers agricoles, les rendements, et la qualité des matières premières. Cela impacte directement la capacité des IAA à s’approvisionner localement, en particulier en fruits, légumes, céréales, oléagineux et protéagineux. Certains départements de l’Occitanie, notamment les plus méditerranéens, sont déjà fortement affectés.
Face à cela, l’État et la Région ont mis en œuvre des plans spécifiques, comme le Plan Agriculture Méditerranée (2024)et des appels à projets territoriaux, notamment sur les légumineuses. Ces dispositifs visent à soutenir la structuration des filières agricoles et leur articulation avec les industries agroalimentaires, autour d’une logique de co-développement durable.
L’autre défi majeur reste la valorisation des produits. Bien que les productions soient souvent de grande qualité, leur positionnement prix, leur visibilité, ou leur différenciation restent perfectibles. Le coût de l’énergie et des matières premières, aggravé par la guerre en Ukraine, a mis sous tension la compétitivité des entreprises, en particulier les PME et TPE, déjà fragilisées par l’inflation.
Dans ce contexte, la Région Occitanie, via son agence AD’OCC et le pôle de compétitivité Agri Sud-Ouest Innovation, soutient l’innovation dans l’agroalimentaire, avec des avancées dans les domaines de l’éco-emballage, de l’agroéquipement, ou encore des nouvelles productions alimentaires et nutraceutiques. Ces initiatives permettent de renforcer la compétitivité tout en répondant aux nouvelles attentes sociétales (durabilité, santé, naturalité).
Enfin, la logistique, pilier de la performance des filières, est un maillon stratégique. L’Occitanie bénéficie d’infrastructures portuaires et de plateformes logistiques importantes, mais parfois menacées économiquement. La relance des circuits courts et la rationalisation des flux via des actions collectives s’imposent comme des réponses concrètes pour pérenniser l’activité.
Perspectives : Construire des filières attractives, durables et exportatrices
Le tissu agroalimentaire d’Occitanie est à un tournant. Face à un enchaînement de crises (économiques, sanitaires, géopolitiques et climatiques), les entreprises régionales doivent adapter leurs modèles. Pour maintenir leur compétitivité, assurer la pérennité des filières et répondre aux attentes sociétales croissantes en matière de qualité, de durabilité et de souveraineté alimentaire, elles s’engagent dans des démarches de structuration, d’innovation et de coopération renforcée.
Les dernières années ont été marquées par une série de chocs exogènes qui ont profondément affecté les IAA régionales. L’envolée des prix de l’énergie et des matières premières agricoles consécutive à la guerre en Ukraine a mis à mal la compétitivité des entreprises, tout comme la reprise de l’inflation qui fragilise la demande intérieure pour les produits alimentaires de qualité. Les campagnes de sensibilisation sur le bien-être animal ont aussi impacté certaines productions, notamment dans la filière viande.
Par ailleurs, les crises sanitaires récurrentes (telles que l’influenza aviaire ou plus récemment l’apparition de la maladie hémorragique épizootique (MHE) en 2023) ont directement touché les filières animales, entraînant des suspensions d’exportation et des restructurations douloureuses dans les départements fortement concernés (Gers, Aveyron, Hautes-Pyrénées…).
À cela s’ajoutent les conséquences du changement climatique, qui accentuent l’irrégularité des productions agricoles et pèsent sur la disponibilité de matières premières locales (notamment fruits, légumes, céréales, oléagineux). Face à cette instabilité, les IAA doivent adapter leurs approvisionnements et repenser leur organisation logistique.
Recréer de la valeur
Dans ce contexte, la création de valeur au sein des filières agroalimentaires constitue un enjeu stratégique. Plusieurs leviers sont aujourd’hui activés à l’échelle régionale pour renforcer la résilience économique des entreprises et soutenir leur compétitivité.
D’abord, des actions collectives sont mises en œuvre dans le cadre du Dispositif National d’Aide à l’Investissement Immatériel (DINAII), qui soutient la structuration de filières locales, la rationalisation des circuits logistiques, et les efforts en matière de responsabilité sociétale. Ces initiatives contribuent à améliorer les marges, à fidéliser les consommateurs, et à développer des modèles d’affaires plus robustes.
Le développement à l’export est également un axe stratégique majeur. En 2023 et 2024, les Rencontres Export Agro ont permis à des dizaines d’entreprises régionales de s’initier ou de se renforcer sur les marchés internationaux. Fin 2024, quatre projets occitans bénéficiaient déjà d’un accompagnement dans le cadre du DINAII Export Collaboratif, soulignant une volonté régionale de mutualiser les efforts pour accéder à de nouveaux débouchés.
Renforcer l’attractivité des métiers agroalimentaires
La résilience des filières passe aussi par leur capacité à attirer et fidéliser les talents. Alors que les tensions sur le marché du travail touchent de nombreux bassins d’emploi, notamment ruraux, la région mène des actions d’ampleur pour renforcer l’attractivité des métiers agroalimentaires. Cela passe par une amélioration des conditions de travail, une meilleure communication sur les carrières possibles, et un travail conjoint avec l’enseignement agricole.
L’Occitanie mise enfin sur la collaboration inter-filières pour faire émerger une vision partagée des transitions à conduire. L’écosystème agroalimentaire, soutenu par des outils comme le pôle Agri-Sud-Ouest Innovation ou l’agence AD’OCC, favorise l’innovation et la mutualisation des savoirs, que ce soit autour de l’agroéquipement, de l’éco-conception, ou de l’alimentation fonctionnelle.
Quelles priorités pour l’avenir de l’agroalimentaire en Occitanie ?
Alors que l’Occitanie dispose d’atouts majeurs pour faire rayonner son agroalimentaire, la structuration du secteur autour de valeurs durables, compétitives et coopératives devient une condition essentielle pour relever les défis des prochaines années. Les priorités qui se dessinent à l’horizon 2030 concernent à la fois la montée en gamme, l’adaptation au changement climatique, la transition énergétique, le renforcement des compétences et la sécurisation des approvisionnements.
Mieux valoriser la qualité et les spécificités territoriales
La richesse du tissu agroalimentaire occitan repose sur un socle fort de productions locales, d’indications géographiques et d’engagements en faveur de la qualité. Pourtant, cette valeur ajoutée n’est pas toujours pleinement captée par les entreprises, souvent fragilisées par des coûts de production élevés, des rendements variables ou une concurrence internationale agressive.
Le renforcement de la stratégie SIQO (Signes d’Identification de la Qualité et de l’Origine) constitue une opportunité d’aller chercher de nouveaux segments de marché, en France comme à l’export. Pour cela, il est nécessaire de consolider les outils de transformation, de renforcer la logistique adaptée aux produits sous certification et d’investir dans des démarches collectives de marketing territorial.
S’adapter aux transitions climatiques et environnementales
L’Occitanie est exposée de façon croissante à des risques climatiques affectant les productions agricoles. L’avenir du secteur agroalimentaire passera par une meilleure articulation entre agriculture régénérative, sobriété des ressources et technologies d’adaptation (irrigation intelligente, gestion de l’eau, diversification culturale, sélection variétale…).
Les entreprises devront s’inscrire davantage dans la logique de décarbonation, en cohérence avec les plans nationaux et européens. L’innovation dans l’éco-emballage, la maîtrise énergétique et la valorisation des co-produits sont des axes prometteurs pour conjuguer performance économique et engagement environnemental.
Repenser l’attractivité et l’organisation du travail
Enfin, la pérennité de la filière agroalimentaire régionale dépendra fortement de sa capacité à former, attirer et fidéliserune nouvelle génération de professionnels. L’évolution des compétences, la reconnaissance des métiers, la qualité de vie au travail et les passerelles entre agriculture, industrie et territoires seront des leviers clés.
Dans ce contexte, l’agroalimentaire en Occitanie peut devenir un modèle de transition, fondé sur la coopération, l’ancrage local et l’innovation utile. Une ambition portée collectivement par les acteurs publics, privés et académiques, dans un écosystème régional riche et mobilisé.
(Source : Agreste)