Tomates, melons, bananes… décrypter leur génôme pour améliorer leur qualité.
Le suspens a duré plus de dix ans : le bananier vient de livrer aux généticiens les secrets de ses 520 millions de bases. Le Cirad et le CEA-Genoscope, avec le soutien financier de l’ANR, viennent d’achever le séquençage de l’espèce Musa acuminata, qui entre dans la composition de toutes les variétés comestibles (bananes desserts ou à cuire).
Le suspens a duré plus de dix ans : le bananier vient de livrer aux généticiens les secrets de ses 520 millions de bases. Le Cirad et le CEA-Genoscope, avec le soutien financier de l’ANR, viennent d’achever le séquençage de l’espèce Musa acuminata, qui entre dans la composition de toutes les variétés comestibles (bananes desserts ou à cuire). Avancée majeure pour la compréhension de la génétique et l’amélioration des variétés de bananes, ce travail a été réalisé dans le cadre du Global Musa Genomics Consortium. Les résultats sont publiés en ligne ce mercredi 11 juillet 2012 dans la prestigieuse revue scientifique Nature.
Une aide essentielle pour l’amélioration des variétés
Capital pour la sécurité à la fois alimentaire et économique de plus de 400 millions de personnes des pays du Sud, le bananier est soumis à des menaces parasitaires constantes. La pression est particulièrement forte dans les plantations qui produisent les bananes « export » retrouvées sur les étals de nos supermarchés. La création de nouvelles variétés plus résistantes est donc une nécessité même si elle est compliquée de par la très faible fertilité des bananiers cultivés.
La séquence désormais disponible permet d’accéder à l’ensemble des gènes de cette plante – plus de 36 000 – et à leur position le long de ses onze chromosomes. Cette connaissance facilitera considérablement l’identification des gènes responsables de caractères tels que la résistance aux maladies et la qualité des fruits. Elle fournira au final une aide essentielle à l’amélioration des variétés de bananiers à partir des nombreuses ressources génétiques disponibles dans le monde.
Un nouveau regard sur l’évolution des génomes
Le bananier est la première plante de sa classe botanique (les monocotylédones), à côté des céréales, pour laquelle un séquençage abouti (ancré sur les chromosomes) a été obtenu. Il constitue à ce titre une référence de grande valeur pour étudier l’évolution des génomes. Les chercheurs ont ainsi pu établir que le bananier a connu trois épisodes de duplication complète du génome indépendant de celles constatées dans la lignée des graminées. Si la plupart des gènes issus de ces évènements de duplication sont ensuite perdus, certains persistent et permettent l’émergence de nouvelles fonctions biologiques. Les chercheurs ont déjà repéré certains facteurs de régulation (les facteurs de transcription) qui sont particulièrement abondants chez le bananier et concourent à des processus importants comme la maturation des fruits.
Ces travaux ont été menés avec le soutien financier de l’Agence nationale de la recherche (ANR).
La séquence du génome du bananier est disponible en accès libre sur le site http://banana-genome.cirad.fr.
Deux autres études publiées ce mois-ci utilisent l’analyse génétique des plantes pour résoudre des problèmes concernant la qualité des fruits. La première avait comme objectif de résoudre le mystère de l’absence de goût des tomates industrielles. La seconde résulte d’un projet espagnol pour séquencer complètement le génome du melon.
Les tomates vont-elles enfin retrouver leur goût ?
Des équipes de recherche américaines et espagnoles ont collaboré afin de comprendre pourquoi les tomates industrielles n’ont pas de goût, une constatation faite depuis longtemps par les consommateurs. Pour obtenir de belles tomates bien rouges, les industriels avaient privilégié dans les années 50 un gène mutant permettant d’obtenir une maturation uniforme des tomates, leur donnant une peau parfaitement colorée.
Les chercheurs ont constaté que les plantes ayant ce gène portent une mutation qui fait qu’un autre gène nommé GLK ne s’exprime pas correctement. La protéine issue de l’expression de ce gène ne peut pas accomplir sa fonction qui affecte les processus chimiques ayant lieu dans les chloroplastes assurant la production des sucres par photosynthèse. Les tomates cultivées possèdent le gène GLK2 mutant et ne présentent pas des niveaux de sucre normaux [1]. Leur saveur s’en trouve affectée.
Cet exemple illustre la complexité de l’expression des gènes et de l’impact que peut avoir une mutation sur l’ensemble du génome. Grâce à cette découverte, les chercheurs vont travailler sur des pistes leur permettant de désactiver les conséquences négatives des mutations. Les tomates pourraient ainsi retrouver dans les années qui viennent toute leur saveur.
Le génome du melon entièrement séquencé
C’est un consortium hors du commun en Espagne qui a conduit au séquençage du génome du melon. Lancé par la fondation Genoma España, le projet nommé Melonomics de 4 millions d’euros a été géré depuis le Centre de Recerca Agrigenomica (CRAG) situé à l’Universitat Autonoma de Barcelona. Il a rassemblé des centres de recherche du CSIC et de plusieurs universités espagnoles et compté sur l’appui financier de cinq entreprises (Semillas Fitó, Syngenta Seeds, Roche Diagnostics, Savia Biotech y Sistemas Genómicos) et de cinq communautés autonomes (Andalousie, Castilla La-Mancha, Catalogne, Madrid et Murcia) [2].
Au final, se sont plus de 450 millions de paires de bases azotées de la molécule d’ADN de cette plante qui ont été lues, aboutissant à l’identification de 27 427 gènes [3]. L’Espagne est le premier exportateur de melon au monde et le cinquième producteur mondial. Le séquençage du génome de cette espèce présentait donc un intérêt économique de premier plan pour l’ensemble des acteurs.
Les chercheurs ont identifié 411 gènes pouvant avoir des répercussions sur les capacités de résistance aux maladies. 89 autres gènes seraient en rapport avec les qualités visuelles et gustatives du produit : couleur, taux de sucre, saveur. 21 de ces 89 gènes étaient identifiés pour la première fois. Jordi Garcia Mas, un des responsables du projet, rapporte que « la connaissance du génome et des gènes en rapport avec les caractéristiques d’intérêt agronomique permettra d’améliorer génétiquement cette espèce afin de produire des variétés plus résistantes et de meilleur qualité ».
Source : agro-media.fr avec le communiqué du CIRAD et bulletins-electroniques.com.
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