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L’eau est devenue un véritable otage idéologique.

L’eau est essentielle à la vie telle que nous la connaissons sur Terre. On meurt d’ailleurs beaucoup plus rapidement de soif que de faim. De ce fait, l’eau est le symbole de la vie. Les peuples qui vivent dans les régions désertiques peuvent en témoigner tous les jours, même si l’excès d’eau peut être aussi source de mort.

L’eau est essentielle à la vie telle que nous la connaissons sur Terre. On meurt d’ailleurs beaucoup plus rapidement de soif que de faim. De ce fait, l’eau est le symbole de la vie. Les peuples qui vivent dans les régions désertiques peuvent en témoigner tous les jours, même si l’excès d’eau peut être aussi source de mort. L’importance de sa gestion justifie qu’elle constitue l’un des thèmes majeurs du prochain sommet G20+ qui se réunira les 18-19 juin à Mexico.

 

L’ineptie de la notion d’empreinte sur l’eau

Le réchauffement climatique entraîne une extension des zones sujettes au stress hydrique. De ce fait, les discours sur la raréfaction des ressources en eau et le concept d’empreinte sur l’eau semblent crédibles.

Pourtant, ces discours catastrophistes sont ineptes, totalement dénués d’appel à la raison. Ils se présentent abusivement comme des corollaires du concept d’empreinte sur l’environnement. Ce qu’ils ne sont pas. Ils omettent en effet totalement le concept fondamental du cycle de l’eau. L’eau n’est jamais que le lien étroit entre deux atomes d’oxygène et un atome d’hydrogène. Ni plus ni moins, que ce soit sous forme liquide, solide ou gazeux.

Les militants végétariens de l’association britannique Water Footprint font d’ailleurs une démonstration par l’absurde de ce concept d’empreinte de l’homme sur l’eau. Selon leur modèle de calcul, il faut 1.600 litres d’eau pour produire 1 kg de pain. Le maximum de gaspillage est atteint avec l’élevage extensif : 16.400 litres seraient engloutis pour produire 1 kg de bœuf, soit 1.500 litres pour un steak ! L’eau absorbée par l’herbe des prairies serait ainsi gaspillée pour satisfaire l’appétit de l’homme pour les produits carnés.

L’organisation internationale Footprint Network a beau souligner les limites des études d’empreinte dans ses « Standards de l’Empreinte Ecologique » (cf. sa note n°14), les entreprises sont tentées de répondre aux questions suscitées dans l’opinion publique sans le moindre souci pédagogique ou sens critique.

Le groupe Suez-environnement se fait ainsi l’écho de la Fondation Water Footprint Network et des propositions du professeur Arjen Hoekstra de l’Université de Twente aux Pays-Bas. Le géant agroalimentaire brésilien Marfrig a programmé une étude qui devrait être publiée en juin prochain. Quant au groupe Cargill Meat Europe, il a déjà calculé avec ses partenaires que, pour l’ensemble de la filière aboutissant à la production des nuggets pour Mc Donald’s, la production de céréales et de protéagineux représente 99% de l’empreinte sur l’eau

Au cours de ma vie professionnelle, j’ai observé d’autres lieux de « gaspillages » bien plus dispendieux en eau que les prairies européennes. La forêt amazonienne en est le lieu le plus visible à l’œil nu : après chaque pluie, on voit s’élever de la forêt d’importantes bouffées de vapeur d’eau à l’image de ce qu’on observe dans un sauna (un arbre évapore 2.000 fois ce qu’il gagne en poids…). Ce « gaspillage » est moins visible mais tout aussi important en régions tropicales désertiques du fait de la siccité de l’air. Après avoir construit un barrage pour alimenter la ville de Biskra en Algérie, les ingénieurs ont ainsi  du se résoudre à l’exploiter à la moitié de sa capacité pour la seule raison que l’évaporation naturelle s’élève dans la région jusqu’à 5 mètres par an ! La surface à l’air libre s’étendant plus vite que le volume au fur et à mesure que le niveau monte dans la retenue, le débit de la rivière qui alimente le barrage aurait été insuffisant pour compenser la seule évaporation sur la retenue. Celle-ci n’aurait été alors qu’un simple trou d’eau dont la surface aurait varié en fonction des pluies d’orage… C’est d’ailleurs la situation des « mers intérieures » comme la mer d’Aral, la mer Caspienne et le lac Tchad. Irriguer pour cultiver des terres, c’est accroître la surface d’évaporation proportionnellement à la surface des feuilles. Les spécialistes parlent alors d’évapotranspiration. On est là confronté au nécessaire arbitrage entre usages, entre différents utilisateurs de l’eau, entre agriculteurs et pêcheurs…

 

Les types d’eau douce à distinguer

Outre la distinction proposée en 1995 par Falkenberg entre l’eau « bleue » qui s’écoule et l’eau « verte » qui est utilisée par les plantes, il faudrait également distinguer l’eau fossile que je qualifierais volontiers d’eau « diamant » du fait de sa valeur. En effet, à la différence de l’eau bleue, l’eau « diamant » s’est accumulée dans des réservoirs souterrains avec des temps de résidence qui se compte en milliers d’années, sans se renouveler, du moins à l’échelle humaine. C’est le cas des gisements profonds du Sahara. Utiliser cette eau « diamant »  revient à pomper dans le capital vital et non renouvelable des régions concernées. Elle devrait donc être gérée comme un véritable bijou de famille. Ses réservoirs géologiques étant généralement sans lien avec les frontières des Etats, sa gestion internationale devrait s’imposer comme c’est le cas pour les ressources du continent Antarctique.

Le lecteur aura remarqué que cette chronique ne fait pas allusion au concept d’eau « virtuelle ». Celui-ci est par contre très pertinent pour analyser la problématique des échanges internationaux d’eau. En reprenant l’exemple de la filière volailles et les bases de calculs de Water Footprint, il justifie le choix politique des dirigeants égyptiens d’importer massivement des céréales et des protéagineux pour développer l’élevage local de volailles pour palier à la faiblesse de leur pays en ressources en eau. Bien que ce concept ne soit pas médiatique, le concept d’eau virtuel est un outil très pertinent pour une gouvernance mondiale de l’eau.

 

Michel Foucault

 

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ParLa rédaction
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