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Non, la viande ne plombe pas le bilan carbone du panier de la ménagère !

Il y a peu, un rapport du Commissariat Général au Développement Durable (CGDD)  a évalué le contenu carbone du panier de la ménagère. Il a ainsi mis en exergue l'important impact de la consommation de viande sur l'environnement.

Il y a peu, un rapport du Commissariat Général au Développement Durable (CGDD)  a évalué le contenu carbone du panier de la ménagère. Il a ainsi mis en exergue l’important impact de la consommation de viande sur l’environnement. Le SNIV-SNCP, qui fédère les entreprises françaises des viandes, a répondu au CGDD dans un communiqué :

Logo du SNIV-SNCP

« Convaincu que le salut de la planète passe par la prise de conscience de la quantité de carbone rejetée par chaque consommateur, le Commissariat Général au Développement Durable (CGDD) a évalué dans un rapport le contenu carbone du panier de consommation courante de 20 000 ménages. Ce document -qui compile des données issues de multiples bases d’informations pas toujours cohérentes entre-elles- met ostensiblement en avant le poids de la viande en termes de coûts et d’impact carbone : « les viandes (y compris les produits transformés à base de viande) représentent 8% du poids moyen d’un panier d’achat et 23% de son coût, mais de l’ordre du tiers de son contenu carbone ». Ceci n’a d’ailleurs pas échappé au quotidien Le Monde, qui dans son édition du 17 avril, titre sans appel : « la viande plombe le bilan carbone des français »…

Les chiffres sont en effet présentés comme des vérités absolues validées par des agences nationales telles que l’Ademe et l’Afnor, le tout portant le sceau du Ministère de l’Ecologie, de l’Environnement, du Développement Durable, des Transports et du Logement. Ce sujet est pourtant loin d’être une science exacte et l’esprit critique devrait être de mise car de nombreuses réserves viennent nuancer la présentation de tels résultats. Le CGDD concède d’ailleurs en toute fin de document que l’émission annuelle par personne selon la catégorie socioprofessionnelle doit être commentée avec précaution car la base de données mobilisée ne permet pas d’en calculer précisément le volume.

Cette précaution devrait être étendue à l’ensemble du rapport puisque la plupart des données mobilisées et des méthodes de calcul sont assorties d’incertitudes importantes (de l’ordre de 30 à 50%) et que de nombreux points méthodologiques sont encore en cours de discussion tant au niveau national qu’international.

Il conviendrait ensuite d’ajouter que la présentation des résultats sous forme de contenu carbone par euro dépensé ou par kg d’achat relève d’un parti-pris qui n’a pas beaucoup de sens.

Il aurait en effet été plus signifiant de rapporter le contenu carbone des aliments à la couverture des besoins nutritionnels qu’ils assurent puisque c’est là leur principale fonction. Si les adolescents consomment plus de viande que les autres comme l’affirme l’étude, c’est bien pour couvrir des besoins nutritionnels importants à un moment de leur vie où la masse musculaire se développe.

Ce parti-pris méthodologique conduit même à une certaine désinformation. Ecrire par exemple, dans un contexte de chasse au carbone, que « la moyenne du contenu carbone des légumes frais est inférieure de 35% à celle des légumes en conserve » a clairement pour objectif d’inciter le consommateur à délaisser les légumes en conserve. Mais en ne regardant les produits que sous l’angle de leur impact carbone, on nie totalement le service apporté par l’emballage ou les modes de conservation tels que la conserve ou la surgélation. Certes, la mise en oeuvre de ces technologies a un impact supplémentaire sur l’environnement mais elles permettent au consommateur de disposer d’un aliment quand il en a besoin et surtout, elles ont au fil des temps libéré l’homme, et même plutôt la femme, d’une partie de ses corvées. Le Commissariat Général au Développement Durable fantasme sur une France ressemblant à celle d’Amélie Poulain où le consommateur a ses deux poules dans son jardin, a le temps de faire ses courses chaque matin à l’épicerie du coin et consacre ses loisirs à l’épluchage des légumes.

Ainsi, le CGDD, dans sa précipitation, utilise à contre-emploi l’Analyse du Cycle de Vie. L’ACV est un outil puissant d’aide à la décision qui permet de décortiquer un processus de production pour identifier les leviers possibles d’action. Mais, dans ce rapport, des chiffres agrégés issus d’ACV théoriques comparent des produits ne faisant pas partie de la même catégorie (légumes frais vs légumes en conserve par exemple). Une étape supplémentaire est franchie en agrégeant les valeurs des biens d’un même panier et en comparant les paniers entre eux pour in fine conclure, avec tout le sérieux du monde, qu’à dépense égale, un ouvrier a un impact incommensurablement plus élevé qu’un cadre supérieur. Quel sens faut-il donner à une telle information ?

L’évaluation de l’empreinte environnementale des produits est une discipline nouvelle pour laquelle nous sommes en phase d’apprentissage. Il est prématuré d’en afficher les résultats au risque de faire de mauvaises corrélations, d’en tirer des conclusions erronées, ou, pire, d’infantiliser le consommateur en lui faisant croire que des leviers d’action sont entre ses mains. En réalité, ce sont les acteurs économiques en relation avec les pouvoirs publics qui ont la capacité d’agir efficacement au plus près du facteur d’émission identifié par l’ACV. Encore faut-il vouloir préférer une approche responsabilisante et structurante à une mesure-gadget rescapée du Grenelle Environnement telle que l’affichage environnemental des produits de grande consommation. »

 

Source: agro-media.fr avec le communiqué su SNIV-SNCP.

ParLa rédaction
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