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Logistique des fruits et légumes : Quand le groupage s’impose comme levier de fraîcheur et d’efficacité

Dans le secteur des fruits et légumes, la logistique n’est plus seulement une question de transport réfrigéré. Elle devient un facteur stratégique décisif, au cœur de la compétitivité des producteurs, distributeurs et transporteurs. Dans une analyse approfondie publiée pour le salon Fruit Attraction qui se déroule actuellement à Madrid, l’auteur Herminia Martínez montre comment la demande de fraîcheur, de …

Logistique des fruits et légumes : Quand le groupage s’impose comme levier de fraîcheur et d’efficacité
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Dans le secteur des fruits et légumes, la logistique n’est plus seulement une question de transport réfrigéré. Elle devient un facteur stratégique décisif, au cœur de la compétitivité des producteurs, distributeurs et transporteurs. Dans une analyse approfondie publiée pour le salon Fruit Attraction qui se déroule actuellement à Madrid, l’auteur Herminia Martínez montre comment la demande de fraîcheur, de fréquence et de durabilité redessine les chaînes d’approvisionnement et stimule le développement du groupage.

La fraîcheur comme pierre angulaire

La première exigence, rappelle Herminia Martínez, reste la préservation de la fraîcheur tout au long de la chaîne. Dans un secteur marqué par la saisonnalité, la volatilité et des circuits souvent internationaux, chaque étape, de l’emballage à la température de stockage, peut fragiliser le produit. Des acteurs majeurs comme Lineage insistent sur la nécessité de solutions innovantes, capables de répondre aux besoins différenciés : fruits rouges et bananes, par exemple, requièrent des conditions très spécifiques d’humidité et de température. L’innovation logistique n’est donc pas un luxe, mais une condition de survie sur le marché.

L’internalisation pour mieux maîtriser les coûts et la qualité de service

La logistique des fruits et légumes doit aussi composer avec de multiples contraintes : variations de volumes selon les campagnes, hausse du prix du carburant, manque de chauffeurs, retards de paiement. Le secteur a bénéficié, en Espagne, d’un soutien conjoncturel via la subvention sur le diesel (2022-2023) et l’introduction d’une clause d’ajustement tarifaire indexée sur l’évolution du carburant. Mais ces mesures restent temporaires face aux défis structurels.

Longtemps marqué par l’externalisation et l’atomisation des acteurs, le secteur évolue désormais vers davantage d’intégration. Les grandes entreprises tendent à privilégier leur propre flotte de camions, comme Primafrio ou Transportes J. Carrión, pour sécuriser leurs capacités et déployer des systèmes numériques de suivi et d’optimisation. Cette internalisation permet de mieux maîtriser les coûts et la qualité de service.

La montée d’opérateurs intégrés, capables de couvrir tout le spectre logistique

Herminia Martínez souligne aussi un mouvement accéléré de concentration. Ces trois dernières années, de grands groupes logistiques internationaux tels que Lineage, Logista, A.T. La Espada, ont multiplié les acquisitions pour renforcer leur présence en Espagne et en Europe. Lineage, par exemple, a racheté plusieurs sociétés espagnoles (dont Transportes Agustín Fuentes), tandis que Logista s’est emparé du groupe El Mosca pour compléter son offre porte-à-porte.

Ces rachats traduisent la montée d’opérateurs intégrés, capables de couvrir tout le spectre logistique : du champ jusqu’à la distribution capillaire. Ils reflètent aussi l’entrée de fonds d’investissement, signe que la logistique des fruits et légumes est perçue comme un marché stratégique à fort potentiel.

Moins de stock, plus de cross-docking

Une autre tendance clé réside dans la réduction des stocks. Les distributeurs privilégient désormais des flux plus fréquents et tendus. Le cross-docking (réception, consolidation et réexpédition immédiate des marchandises) s’impose face au stockage classique.

Cette évolution bénéficie directement au groupage, qui permet aux producteurs de mutualiser leurs envois et d’accéder à une distribution fine sans immobiliser leurs propres infrastructures. Des entreprises comme El Mosca, Salvesen Logística ou DHL avec leurs divisions spécialisées (Freshline, Grupag) développent des services dédiés au transport en lots partiels. Certaines plateformes traitent déjà plus d’un million de palettes par an en groupage, preuve d’un basculement d’échelle.

Le rôle stratégique des entrepôts de groupage

L’essor du groupage pousse les opérateurs à investir dans des centres logistiques stratégiquement situés : à proximité des bassins de production en Espagne et en Europe, mais aussi près des frontières et des grands axes de distribution. Primafrio illustre cette dynamique avec des plateformes de consolidation implantées à Murcie, Valence, Huelva ou encore Belfort, en France. Transportes J. Carrión suit la même logique avec une couverture complète des zones de production.

Ces infrastructures permettent d’optimiser les trajets, de réduire les kilomètres à vide et de garantir la continuité de la chaîne du froid. Elles constituent aujourd’hui le cœur d’une stratégie logistique où la vitesse et la précision priment.

Vers des solutions intégrées et digitalisées

Le transport ne suffit plus : les clients exigent des solutions logistiques intégrales. La préparation de commandes, la gestion documentaire, la traçabilité en temps réel et même des services à valeur ajoutée (ensachage, pesage, contrôle qualité) sont désormais attendus. Comme le souligne Brivio & Viganò, l’optimisation des coûts et de la qualité dépend autant de l’efficacité logistique que de la maîtrise du produit lui-même.

La digitalisation joue ici un rôle central. Les innovations technologiques permettent d’assurer une communication fluide avec les clients, de suivre en temps réel la température ou la localisation des envois, et de garantir une transparence totale. Les distributeurs recherchent également des solutions intermodales, combinant rapidité et durabilité, pour limiter l’empreinte carbone.

Un secteur sous pression, mais riche en opportunités

Comme le résume Herminia Martínez, la logistique des fruits et légumes est entrée dans une phase de transformation accélérée. La demande croissante de fraîcheur et de fréquence pousse les opérateurs vers le groupage et les solutions intégrées. La concentration des acteurs, la digitalisation et la durabilité environnementale redessinent un marché autrefois fragmenté et aujourd’hui dominé par des opérateurs de taille mondiale.

Pour les producteurs et distributeurs, cela signifie davantage de fiabilité, mais aussi une exigence accrue de flexibilité. Pour les transporteurs, c’est l’opportunité de se positionner comme partenaires stratégiques de la chaîne agroalimentaire.

En définitive, conclut l’auteur, la logistique des fruits et légumes n’est plus une simple fonction d’acheminement. Elle devient un levier de compétitivité, un champ d’innovation et un vecteur de différenciation dans un secteur où la fraîcheur du produit est synonyme de valeur ajoutée.

(Source : Fruit Attraction/ Auteur Herminia Martínez)

Les chiffres clés de la logistique des fruits et légumes

Espagne, leader européen : 12,5 millions de tonnes de fruits exportés en 2023 (principal exportateur de l’UE) ; Plus de 50 % des exportations européennes de fruits et légumes frais proviennent d’Espagne ; Principaux marchés : Allemagne, France, Royaume-Uni, Pays-Bas.

Croissance du marché logistique sous température contrôlée : Le marché européen de la logistique réfrigérée est estimé à 37 milliards € en 2024 ; Croissance annuelle moyenne attendue : 6 % d’ici 2030.

Groupage et cross-docking : En Espagne, plus de 70 % des flux de fruits et légumes frais utilisent aujourd’hui le groupage pour les livraisons internationales ; Une plateforme de cross-docking moderne permet de réduire les stocks de 20 à 30 % et d’accélérer les flux.

Pression sur les coûts : Le carburant représente jusqu’à 30 % des coûts logistiques dans le transport sous température dirigée ; L’augmentation des coûts énergétiques a provoqué une hausse moyenne des tarifs de transport de 12 % en 2023.

Durabilité et innovation : Objectif UE : réduction de 55 % des émissions de CO₂ d’ici 2030 (Green Deal) ; Les grands opérateurs (Lineage, Primafrio, Logista) investissent massivement dans la digitalisation et l’intermodalité rail-route ; Un camion optimisé en groupage peut éviter jusqu’à 15 tonnes de CO₂ par an par rapport à des flux éclatés.

ParLa rédaction

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